L’entrepreneur rationnel développe sérieusement son business, gagne parfois beaucoup d’argent lorsqu’il atteint un stade de rupture, de crise, qui le déboussole en profondeur en remettant tous ses compteurs et toutes ses croyances à zéro.
Car l’entrepreneur rationnel souffre par excès de sa principale qualité : sa rationalité devient une fin en soi quand elle pourrait être au service de sa créativité et donc de son rayonnement et épanouissement commercial.
Portrait de l’entrepreneur rationnel
L’entrepreneur rationnel prévoit, calcule, anticipe, se forme, apprend, travaille dur, beaucoup.
Il a du mérite, beaucoup de mérite (mais a bien du mal à le reconnaître !). Et le mérite est un lourd fardeau à porter car qui dit mérite dit justice et donc par opposition injustice et frustration.
Un entrepreneur méritant qui réussit devient prisonnier de la croyance que sa réussite est le fruit d’un dur labeur dont il ne peut se soustraire sous peine de voir sombrer son business et lui avec. Il va donc travailler encore plus dur pour maintenir et développer ses résultats.
Un entrepreneur qui ne réussit pas à la hauteur de ses investissements (en temps de travail, en sacrifices, en efforts, en formation, en coaching, etc) travaillera lui aussi encore plus dur car l’entrepreneur rationnel a d’immenses qualités qui peuvent également s’avérer ses pires ennemis : il se remet en question tout le temps et il est perfectionniste. C’est un « puriste », en tout il s’investit à fond, apprend beaucoup et vite, fait le tour du sujet, puis s’intéresse à un nouveau sujet. Il n’aura de cesse de comprendre ses erreurs pour progresser et s’améliorer, il aura besoin d’aller au bout de ses démarches, de lui-même pour ne pas avoir de regrets, ni de doutes. Son attente et son besoin de reconnaissance sont naturellement à la hauteur de tous ses efforts. Ce qu’il ignore souvent c’est qu’il a besoin d’être reconnu pour qui il est et non pour les résultats qu’il affiche.
Dans les 2 cas, travailler à la sueur de son front est le seul moyen à ses yeux pour réussir. L’entrepreneur rationnel peut s’épuiser sans même s’en rendre compte, aller au-delà de ses forces et de son équilibre. Il s’autorisera peu de répit, peu de bienveillance envers lui-même et peu voire pas d’imperfections. Le droit à l’erreur, oui, mais seulement s’il en retire un enseignement pour faire mieux.
L’entrepreneur rationnel est très exigeant envers lui (comme envers les autres), il place la barre très haut, de sorte qu’il lui est très difficile de l’atteindre. Il se sent alors en perpétuel échec même si pour les autres c’est un modèle de persévérance et d’actions.
C’est qu’il a su s’adapter à ce que notre société, son éducation, sa famille, ses employeurs attendaient de lui : raisonner, obéir, respecter les règles et les méthodes, se conformer, réussir, amasser, montrer, démontrer. Ce schéma en devenant la norme valorisée et reconnue par notre société ne lui a pas donner à voir d’autres possibilités pour développer son business. Car encore aujourd’hui la réussite d’un entrepreneur se mesure à la hauteur du chiffre d’affaires qu’il réalise ou du nombre de salariés qu’il emploie.
L’entrepreneur rationnel fait preuve d’une intelligence fine (et cela va bien au-delà des diplômes qu’il a obtenu ou non d’ailleurs) : il perçoit, décrypte, analyse, comprend, apprend, déduit, conçoit, améliore. Il est même tellement plus que tout cela, mais il ne le voit pas.
Le syndrome de l’entrepreneur rationnel
Le problème c’est que l’entrepreneur rationnel développe toujours un peu plus sa rationalité. Il ne peut pas se satisfaire du résultat obtenu quel qu’il soit. Sa course l’amène toujours un peu plus loin sur le chemin du « mieux ».
Mais travailler à la sueur de son front rend sourd à la musique de son cœur (pour comprendre en quoi le travail et les efforts sont contraires à l’expression de vos talents, vous pouvez lire « Devenir la star que vous êtes – Libérez vos talents »)
L’entrepreneur qui pêche par excès de rationalité s’éloigne un peu plus à chaque effort de sa créativité, de son âme, de sa sensibilité.
A force de développer son business à coups de « je dois » et de « il faut » en suivant les diktats extérieurs de réussite et les opportunités de marché qui ne se refusent pas, il se coupe de lui-même, étouffe sa voix/voie intérieure, meurt à petit feu.
Sa persévérance et son travail le conduisent presque malgré lui à ne plus faire ce qu’il aime et à ne plus aimer ce qu’il fait.
La renaissance de l’entrepreneur rationnel
Les entrepreneurs qui me contactent sont en majorité des entrepreneurs rationnels. Ils arrivent au bout de leur course qui vidée de son sens ne leur apporte pas l’essentiel : leur équilibre, leur épanouissement, leur réalisation.
Réaliser signifie : « rendre réel et effectif ; construire, élaborer quelque chose qui était à l’état de projet, de pensée. »
Cela leur correspond tellement ! Ils le ressentent intuitivement et/ou dans leur corps, ils veulent renaître à eux-mêmes en exprimant ce qu’ils refoulent depuis si longtemps et qui pourtant est là et ne demande qu’à être réel. Tout ce qui n’est pas rationnel et les rend complet : leur créativité, leur âme perdue (d’enfant), leur cœur.
Amputé d’une partie d’eux-mêmes, ils doivent réapprendre à fonctionner, à marcher. Compliqué quand on a nié avoir 2 jambes, et donc musclé exagérément l’une des 2 tout en atrophiant l’autre. C’est pourtant, exactement le chemin qui les attend : prendre conscience qu’ils sont beaucoup plus que leur mental et renouer avec tout le reste dans leur business comme ailleurs.
Attirant les personnes qui nous ressemblent au-delà de ce qu’on laisse montrer, beaucoup de mes clients sont des entrepreneurs rationnels en crise. Et depuis ma propre crise et ma mue qui m’ont conduit au coeur de mon identité et de ma créativité, je me rends compte que les plus rationnels d’entre eux sont aussi ceux qui ont le plus fort potentiel créatif refoulé ! (j’évoque en détails la crise que j’ai traversée et la mue qui a suivi dans les articles « Perdre son équilibre pour mieux le retrouver », « Crise existentielle de l’entrepreneur »)
L’entrepreneur rationnel, ce créatif qui s’ignore
Oui l’entrepreneur rationnel possède une forte créativité mais soit il l’ignore totalement d’un haussement d’épaule qui dit en substance « pfff n’importe quoi ! » (je pense intimement qu’il en fait plutôt le déni pour se cacher -et se protéger- sous des couches bien épaisses mental rassurant et confortable), soit il lui donne bien peu de valeur, suivant ainsi le modèle de la société dans laquelle il a grandi.
Pourtant, c’est bien sa créativité qui cherche tôt ou tard à s’exprimer, la crise traduisant un point de rupture et donc un besoin de recentrage en profondeur. A la frontière de soi, le rayonnement s’affaiblit.
L’entrepreneur rationnel cherche alors l’équilibre entre son bonheur et son CA, sa réalisation personnelle et professionnelle, son investissement dans sa mission et le sens de celle-ci, son cerveau gauche et son cerveau droit, sa profondeur et sa légèreté, le futur et le présent.
Le problème avec ce terme de « créativité » c’est que la plupart du temps, l’entrepreneur rationnel l’entend de façon erronée, exigeante et puriste (ben oui !). Il confond créativité avec talents manuels, pense que créer s’entend uniquement dans le domaine artistique, croit qu’il faut savoir dessiner ou peindre pour prétendre être créatif, ce qu’il ne sait absolument pas faire évidemment !
Or être créatif c’est être soi tout simplement et complètement, c’est laisser la place à ses sens et à ses aspirations, ses rêves, c’est contribuer plutôt que vendre, c’est jouer à améliorer le monde, donc perdre ou gagner, le principal étant de participer, c’est danser avec la vie et son business, faire des connexions entre ses ressentis et ses idées. Et justement l’entrepreneur rationnel a des idées, beaucoup d’idées. Généralement il ne peut pas le nier mais aussitôt il ajoute un « oui mais » qui caractérise si bien son doute permanent et son manque de confiance en lui, parfois bien caché.
Il lui faudra lâcher prise avec son mental, réapprendre à écouter sa voix/voie intérieure, faire confiance à sa dimension sensorielle, accepter son intelligence du cœur, valoriser son intuition et ses émotions, réhabiliter son âme (d’enfant) … et faire de son business, leur terrain de jeu et leur plus belle expression pour que mission d’entreprise s’aligne avec sa mission de vie (pour savoir comment la trouver, lisez mon article Trouver sa mission de coeur).
Alors seulement l’entrepreneur rationnel pourra mettre les qualités de son mental au service de sa créativité et développer un business épanouissant et rayonnant.
Est-il utile de dire que l’entrepreneur rationnel c’était moi il n’y a pas si longtemps, moi encore très souvent … mais en conscience désormais.
Dès le 1er jour où je suis devenue entrepreneur, j’ai ressenti ce RDV avec moi-même sans bien le comprendre, car lorsqu’on entreprend un business, on entreprend bien davantage : un voyage au coeur de soi !
Et vous, vous reconnaissez-vous dans le syndrome de l’entrepreneur rationnel ?
absolument ! même si le coeur est notre deuxième cerveau, encore faut-il lui laisser les coudées franches ! 🙂
merci pour cette magnifique description de l’entrepreneur rationnel.
Super ton article Cécile ! Décidément nos chemins se croisent et se décroisent, et qu’est ce qu’on a comme points communs… C’est exactement ça. Je bataille en ce moment entre les 2…. cerveau rationnel et créatif, j’en suis arrivée au stade où je remets en cause la créativité qui émergeait, j’en suis venue à me demander si je ne devrais pas l’envoyer valdinguer (ou laisser au champ d’ « extra-professionnel » et revenir à plus de rationnel, à la cadre sup qui écrasait tout sur son passage parce qu’on souffre moins !). Je vais te raconter un rêve que j’ai fait il… Lire la suite »
C’est tout à fait ça ! A la fois par notre éducation, certes rationnelle, notre scolarité qui fait appel + à notre cerveau gauche mais aussi quand on n’a pas encore les moyens d’embaucher pour déléguer et se consacrer uniquement à la créativité. Nous n’avons pas tous notre Pierre Bergé qui gère pour nous laisser créer notre collection automne hiver… Mais dès que l’entreprise croit, je recommande de déléguer toute cette partie rationnelle qui sclérose l’intuition et la créativité.